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A la Capitale - Les étudiants chinois à Paris de la première moitié du XXe siècle

Le livre intitulé A la Capitale - Les étudiants chinois à Paris de la première moitié du XXe siècle sera présenté au public à l’Hôtel Neptune, 15 rue Godefroy, Paris 13e, le 5 et le 6 juin 2021. Une exposition du même nom avec d’autres événements y auront lieu. 

Huadu花都, la Capitale des fleurs, est le surnom de Paris chez les étudiants chinois en France depuis le début du XXe siècle, comme la « Ville lumière » pour les Français. Le Huadutait bien au-delà d’une ville, c’était la scène où se croisaient l’enthousiasme, le ravissement, la désillusion et l’angoisse de cette époque. Nous estimons qu’au moins 2000 étudiants chinois ont vécu, étudié ou travaillé à Paris au cours de la première moitié du XXe siècle, dont Zhou Enlai周恩来 (1898-1976), le premier ministre de la République populaire de Chine à son établissement.

Zhou Enlai devant son logement de la rue Godefroy, Paris 13e

Zhou Enlai devant son logement de la rue Godefroy, Paris 13e

Entre 1922 et 1924, Zhou Enlai se logeait dans un hôtel situé rue Godefroy dans le 13e arrondissement de Paris, devenu aujourd’hui l’Hôtel Neptune. Bien qu’il soit peu possible de retrouver des traces laissées de son séjour à l’époque, cet hôtel nous fournit tout de même un espace précieux pour remonter dans le temps, et nous permet ainsi de nous rappeler et de vous raconter les histoires de quelques étudiants chinois vivant à Paris il y a cent ans.

Au début du XXe siècle, sous l’impulsion de Souen Pao-ki 孙宝琦 (1867-1931), alors ministre de Chine à Paris, a été mis en place un échange intellectuel et éducatif entre la France et la Chine. Dans cet élan, les premiers étudiants chinois payants sont partis pour la France en 1902. Après la chute de l’empire, deux programmes d’éducation ont marqué successivement l’apogée de cette tendance : le Mouvement travail-étude (1919-1920) qui proposait de vivre une vie alternant travail et études en France ; et le l’Institut Franco-Chinois de Lyon (l’IFCL, 1921-1950) qui a reçu au total 473 étudiants résidant dans le Fort St-Irénée à l’ouest de Lyon ——dont au moins 40% ont fini leur dernière étape d’études à Paris.

La réunion des étudiants-ouvriers organisée par l’Association des étudiants chinois à l’étranger avant leur départ pour la France, mars 1919

La réunion des étudiants-ouvriers organisée par l’Association des étudiants chinois à l’étranger avant leur départ pour la France, mars 1919

Tout en étant préparés, ces jeunes gens montèrent sur le paquebot, démarrèrent leur voyage vers la Capitale des fleurs. Toutefois, il est peu probable d’être totalement préparé pour Paris. D’une manière ou d’une autre, cette ville va vous surprendre. Paris vous offrira d’innombrables possibilités, l’accès à des rencontres et aventures merveilleuses. Tant tôt elle vous fera jouir, tant tôt elle vous noiera dans la souffrance. Comme ce qu’exclame Xu Zhimo 徐志摩 (1897-1931) : « Ceux qui sont allés à Paris, n’auront plus d’envie de se rendre au paradis ; et ceux qui auront goûté Paris, franchement, ils perdront même toute curiosité pour l’enfer ».

Illustrations de couverture de Bali de linzhua [Des fragments de Paris] de Xu Zhimo par Xu Beihong, 1927

Illustrations de couverture de Bali de linzhua [Des fragments de Paris] de Xu Zhimo par Xu Beihong, 1927

C’est pour cela qu’il est incomplet, et même injuste de réduire leur parcours en un bilan des diplômes obtenus, des thèses soutenues, des manifestations exercées et des prix gagnés. Comme aujourd’hui, ces étudiants chinois il y a cent ans avaient les mêmes soucis quotidiens à Paris, avec en priorité les problèmes du logement et de la nourriture. La manière dont ils essayaient de résoudre ces problèmes constitue déjà une partie importante de leur histoire. Certains d’entre eux devinrent des innovateurs et des fondateurs ; alors que beaucoup d’autres finirent par disparaître silencieusement dans l’ombre de l’histoire. Ils n’ont jamais partagé le même destin, mais ils ont partagé ce Paris de la première moitié du XXe siècle.

Fan Tchumpi, Jeune Fille jouant de la Flûte, Les Annales, Salon des artistes français en 1924.

Fan Tchumpi, Jeune Fille jouant de la Flûte, Les Annales, Salon des artistes français en 1924.

À la fin de cette longue procession de voyageurs-étudiants à Paris, trois personnes qui ne veulent pas que les histoires de leurs prédécesseurs tombent dans l’oubli, ont fait ce petit livre mémorial pour eux. Il se compose de cinq articles concis sur les divers aspects de la vie parisienne de ces jeunes gens, leur vision imaginaire de la Capitale des fleurs et la vie qu’ils envisageaient, leur survie et leurs études. Ces articles sont accompagnés de riches illustrations et de références, offrant ainsi des pistes à poursuivre pour les lecteurs qui sont intéressés par l’histoire de cette période. Lors de la parution de ce livre, une exposition illustrant leurs parcours parisiens aura lieu à l’ancienne demeure de Zhou Enlai, elle racontera leur vie avec leurs propres paroles.

Certes, par rapport à l’ensemble de leurs histoires dans la Capitale des fleurs il y a cent ans, qui représente un véritable trésor pour les historiens, ce livre n’est qu’un segment des innombrables légendes, une goutte d’eau d’un immense océan. À Paris il n’y a pas de passants anonymes. Paris se souvient d’eux, alors nous ne devons pas les oublier. Tout ce que nous espérons, est qu’un jour, lorsque l’on verra un arbre toucher le ciel, on se souviendra qu’il a été planté et arrosé pour la première fois par eux il y a cent ans.